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JMculture
26 mai 2016

L'odyssée, un exil, un voyage par les premières Cinéma

Waouh. Le livre d'histoires et de textes des premières CAV est sorti! Voici la couverture et deux textes que vous pouvez trouver à l'intérieur. Le livre est au cdi et sur le site du lycée. Et spécial dédicace à Mathieu Robin, l'écrivain qui a accompagné les élèves dans l'écriture.

couverture

608 

Maëlle Ambroise

 

            J'étais là, sur ce ferry, pour une seule chose : retrouver le meurtrier de mes parents.

J'avais décidé cela il y a plusieurs mois lorsque j'étais en train de regarder un flyer de cette croisière.
Et maintenant, j'étais là, à attendre l'heure où je pourrai retrouver, torturer et tuer ce connard qui avait anéanti la vie de mes parents, détruisant ainsi la mienne.
 Allongée sur mon transat, les deux pieds levés vers le ciel, les lunettes de soleil tombées sur le nez, je bouquinais un livre très instructif sur le sujet.

Il s'intitulait « Level 26 ». L'histoire était celle d’un homme complètement timbré qui prenait du plaisir à disséquer des gens.

            Arrivée à la moitié de mon livre, je décidai d'aller un peu dans ma chambre pour me préparer à un bal costumé à l'occasion des 30 ans du ferry. L'âge se faisait d'ailleurs ressentir.

            En passant dans les couloirs, je vis un chandelier sur une table basse en bois où étaient sculptées des fleurs, plus précisément des roses. C'est censé être joli des roses, mais à moi, cela me remémora uniquement d'horribles choses. En revoyant ces roses, je revis mon père à l'agonie se faire exploser la tête par cet enfoiré. Je me rappellerai toujours les bouts de cervelles qui ont giclé contre le mur ainsi que sur le doux visage de ma pauvre mère. J'avais tout observé à travers la fissure de l'armoire dans laquelle ma mère m'avait cachée avant l'arrivée de ce monstre sans cœur. La dernière chose que je vis avant l'arrivée de la police était une rose blanche recouverte de sang tombant délicatement des mains de la femme qui m'avait mise au monde.  Je m'en souviens et je m'en souviendrai toujours.

  Je secouai la tête et me dirigeai vers ma chambre qui était numérotée «608». Je grimaçai. Cette chambre, je l'avais payée à bas prix, et j'avais compris pourquoi en y entrant.
Un lit une place était disposé au centre de la pièce. Il était recouvert d'une couverture verte qui avait dû déteindre au fil des années. Sur le côté du lit, une table de nuit et un réveil qui, à première vue, ne devait pas être plus jeune que ma grand-mère. Je ne remarquai aucune douche, je supposais donc qu'on devait avoir une douche commune dans le couloir.
 Il devait être 19h14 quand je décidai de m'accorder un petit somme et pour cela, j'allai m'allonger sur le lit. Il ne me fallut que peu de temps avant de sombrer dans le cercle vicieux qu'on nomme les rêves mais qui sont pour moi des cauchemars.

        Quand j'ouvris les yeux, je me trouvais dans une pièce au milieu de laquelle se tenait un siège en cuir écorché de partout, et tout autour de lui, des étagères comportant chacune au moins une centaine de cassettes qui, à vue d’œil, étaient classées selon les dates.

            Soudain un écran géant, qui devait faire au moins deux mètres de haut, s'alluma et commença à diffuser des images mais des images que je ne connaissais trop bien. Les cris de ma mère et le bruit du chandelier heurtant la tête de mon père…   c'est à ce moment-là que j’eus le courage de regarder et je m'en félicitai car grâce à ça, je pus apercevoir sur la peau de la main droite de ce putain de psychopathe une magnifique brûlure bien prononcée que maintenant je reconnaîtrais entre mille. Seulement les cris et les pleurs recommencèrent à envahir mon crâne alors je me mis en position foetale contre le mur en me répétant : « Tu n'as aucune emprise sur moi, ce n'est qu'un rêve. Tu n'as aucune emprise sur moi, tu n'es qu'un rêve. Tu n'as auc...» et je continuai jusqu'à mon vrai réveil dans mon monde. En me relevant, j'eus quelques vertiges qui me sont habituels et me retrouvai en sueur.

            Une fois ma douche prise, je commençai à me préparer. Ce jour-là, pour le bal, j'avais choisi un costume particulier : un cygne noir.

Cette tenue était composée d'une robe noire couleur onyx, de longs gants en soie noire, d'un arlequin qui lui était gris pailleté pour s'accorder à mes escarpins. Une fois prête, ce fut l'heure d'y aller même si je n'étais pas motivée, mais tout simplement déterminée à tuer ce salaud.

            Entrée dans la salle, après plusieurs passages devant les trois personnes qui devaient nous fouiller pour je ne sais quoi.
Quelques verres de punch, pour me mettre dans l'ambiance qui, elle, était très décontractée.
Je me laissai alors emporter dans la foule de danseurs. La personne qui m'y avait embarquée était un jeune homme un peu plus vieux que moi qui s'appelait Joshua. On dansait, dansait, et moi je sentais l'alcool me brûler la gorge et j'avais la tête qui tournait, qui tournait, mais ça faisait longtemps que je m'étais pas sentie si bien et posée.
Jusqu'au moment où j'ai eu le malheur de faire pivoter ma tête un peu trop à gauche... Un homme s'esquivait, poussant devant lui un gosse et sa mère dont il enserrait la gorge... Mais ce n'est même pas cela qui m'interpella. C'était une brûlure sur sa main droite ...

            Alors je vis rouge. Tout autour de moi devint flou et je partis en furie dans la direction où il avait emmené cette pauvre femme et son gosse. Puis je m'arrêtai devant la porte où je les avais vus disparaître...

C'était le placard à balais du concierge. Je donnai un coup de pied dans la porte et entrai en trombe ... pour stopper net à la vue ce qui se trouvait dans cet endroit.

Au sol se trouvait la mère, la tête explosée et du sang coulant de sa bouche, mais aussi le petit garçon, penché au dessus de sa mère et la suppliant de lui répondre malgré le silence de mort qu'elle lui offrait.

Et là je l'aperçus, l'homme qui avait détruit cette femme et ma famille. Alors que j'étais en train de bugger sur cet homme, il me sauta dessus et on se lança dans une bataille sans merci. Lui me donnait des coups de poing et moi je lui arrachais des morceaux de peau à coups d'ongles et de dents.
On continua ainsi jusqu'à ce que j'aperçoive une pelle en fer. Je la saisis et lui assenai un coup assez violent à la base du crâne, point critique : d'ailleurs l'homme s'évanouit. J'en profitai pour le ligoter avec des cordes que je trouvai dans le placard. C'est alors que je pus m'appliquer à lui arracher les ongles un par un ; ensuite je tranchai ses phalanges une par une, ce qui dut le réveiller car il commença à ouvrir les yeux et à hurler.

            Quand j'eus fini la main droite, je me décidai à passer à l'étape suivante. Je me plaçai devant lui et lui dis: «Tu es prêt, salaud ?!» Et d'un coup je lui mis le doigt dans l’œil et lui écrasai le globe oculaire. L'homme se débattait et hurlait mais moi j'étais au summum de l'excitation quand tout à coup je vis ma vision se brouiller et sentis ma gorge tranchée et c'est là que je sus que tout était fini...

Il venait de terminer le travail qu'il avait commencé il y avait de cela 11 ans, c'est à dire 108 semaines...

 

dessin maelle ambroise pour son texte et la quatrième de couverture

 

 

Une Odyssée 

Marc Bono 

- Tu veux que je raconte une histoire ? Celle de ta grand mère et la mienne, de la guerre, de notre vie en Espagne à notre arrivée en France ?

- Sérieusement ? T'avais jamais voulu m'en parler avant…

- Je sais… je suis un peu dur et j'aime pas parler de ma vie. Mais maintenant que ta grand -mère est morte, j'ai plus envie de continuer à vivre. Mon cancer va pas tarder à me rappeler auprès d'elle. Il faut que tu connaisses mon histoire !

- Je t'écoute.

- Note ce que je vais te dire, vu que je sais pas écrire, plus tard tu verras ces lignes et tu te souviendras de moi !

Je m'appelle Salvador, et ceci est mon histoire :

 

 

Je ne sais pas quand je suis né, tout ce que je sais, c'est que j'ai vu le jour à Tavernes près de Valencia en Espagne. Mon père était un socialiste et donc ennemi de Franco. Pour éviter d'être repéré, il s'était enfui dans la montagne environnante avec quelques maquisards où ils mettaient au point des plans visant à combattre Franco. Dès mon plus jeune âge, j'étais chargé avec des amis de prendre des provisions et de les apporter de nuit aux maquisards. J'ai fait cela jusqu'au jour où la police a débarqué dans la place centrale du village, juste en face de l'église. Ils emmenaient avec eux quatre prisonniers encapuchonnés. Lorsqu'ils ont retiré leur sac, j'ai reconnu l'un d'eux : c'était mon père. Les exécutions étaient monnaie courante ici, mais lorsque j'ai reconnu mon père, j'ai manqué de m'écrouler. J'ai pas écouté ce que disait le policier quand il a appuyé son arme sur la tempe de mon père, j'ai entendu que la détonation. Quelques mois plus tard, ma mère mourut de chagrin et alla le rejoindre auprès de Dieu. Oui je crois en Dieu mais je hais l’Église, ils étaient du côté de Franco, ceux qui ont tué mon père. J'étais donc livré à moi-même. J'ai commencé à travailler à la vigne et aussi en tant que maçon. Je dormais dans la rue. Je savais qu'il ne me restait plus beaucoup de temps à vivre si je continuais comme ça. La guerre finie, Franco avait écrasé la rébellion mais la famine s'installa en Espagne. Je n'ai donc eu d'autre choix que de m'engager dans l'armée, celle qui avait tué mon père, pour survivre. Je suis arrivé à Valencia où j'ai rencontré la femme de ma vie : Dolores , très catholique malgré sa haine envers Franco, qui avait vu le jour à Avanilla dans la région de Alicante. Son père était mort à la guerre et sa mère d'une grippe. Elle s'est retrouvé orpheline à 8 ans et a été contrainte de devenir servante. Lorsqu'elle a atteint la majorité, elle est venue vivre à Valencia. Après quelques années de vie commune, on a eu un enfant. Malheureusement , il nous a quitté 4 mois plus tard suite à la maladie bleue. On s'est enfin enfui en France, à Bédarieux. On s'est vite rendu compte qu'on était pas arrivé au paradis qu'on espérait. Là, nous avons eu quatre enfants : deux filles, Marie José et Janine, ainsi que deux garçons, Michel et Paul. Ma femme, mes enfants et moi, on a été victime de racisme et d'insultes du genre «  Bande de profiteurs », «  Espagnol de merde », « Vous profitez de notre argent ».

Alors que j'ai passé ma vie à travailler comme un chien, je pénaillais à nourrir mes enfants pour entendre ça, je faisais le travail que les Français ne voulaient pas faire ! Je hais le racisme. Mes enfants sont aujourd'hui mariés et ont des enfants. Ma femme est morte il y a 4 mois suite à un cancer du pancréas. Assis sur ce lit d’hôpital, je sais qu'il ne me reste plus beaucoup de temps non plus, j'ai un cancer du foie et je ne peux plus marcher. Je t'ai fait ce court récit pour raconter ma vie, certains appellent ça une « odyssée » mais je ne sais pas ce que ça veut dire.

 

***

J'ai toujours trouvé très important le fait de bien connaître ses origines. Comprendre d'où l'on vient pour savoir où l'on va. J'ai des origines néerlandaises et espagnoles, et je sais combien cela sera important dans ma vie, le fait d'être le fruit de deux cultures et histoires complètement différentes. C'est parfois difficile car on a du mal à trouver son identité, mais cela reste très important, son histoire en est un exemple poignant. Je n'oublierai jamais tout ce que m'a raconté mon grand père, cela restera ancré en moi à jamais.

Ça fait maintenant 7 ans que mon grand père est mort. Aujourd'hui, je peux lire ce texte avec du recul et un regard plus profond. Je me rends compte de la difficulté à laquelle était confronté mon grand père et la plupart des immigrés espagnols (et d'autres immigrés à cette époque et encore aujourd'hui où le racisme est très présent ). Je n'ai pas essayé d'enjoliver ce qu'il m'a dit, de rendre ses propos plus littéraires. J'ai cherché à rester sobre, écrire mot pour mot ce qu'il m'a dit. C'est ce qu'il aurait voulu, vu qu'il ne savait ni lire ni écrire, il ne voulait pas le cacher. C'était comme une cicatrice, un symbole de sa souffrance passée, il a toujours assumé ce qu'il était sans chercher à passer pour quelqu'un de meilleur, mais pour moi, c'est une source d'inspiration. Je l'admire très sincèrement, il n'y a pas un jour où je ne pense à lui. Il représentait l'esprit espagnol à son apogée : La Fierté. J'espère que personne ne vivra plus une telle histoire car elle a rendu mon grand père rude et méfiant malgré son grand cœur. Paix à son âme .

 

 

 

 

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